Les nanoparticules dans les emballages alimentaires : une bonne idée ?

Le secteur de la préservation des aliments voit beaucoup de bénéfices à l’utilisation des nanotechnologies dans les emballages. Cependant, des échanges se font entre l’emballage et le produit. Comment cela fonctionne-t-il ?

Pour y voir clair, il faut s’intéresser aux échanges physicochimiques qui peuvent avoir lieu dans une épaisseur d’à peine un millimètre, là où l’emballage se trouve en contact avec le contenu et, en même temps, garder un œil sur les conditions qui sévissent au sein de ce petit film protecteur. À quelle température est maintenu le produit ? Combien de temps restera-t-il en rayon avant d’être acheté et consommé, ce qui détermine la durée de contact ?

Au cours du temps, les nanoparticules peuvent migrer : quitter l’emballage pour aller vers le produit. Mais certaines d’entre elles pourraient être encore plus sour­noises : non seulement elles migreraient mais elles inciteraient d’autres composés à se déplacer. Ces derniers ne sont pas des nanos mais peuvent ne pas être plus innocents. Certains sont classés comme cancérigènes ou bien sont des perturbateurs endocriniens dont l’action a été démontrée1.

Théoriquement, la migration implique deux condi­tions : le contact prolongé et la mobilité propre à chaque nanoparticule. Si le contact est prolongé, les nanoparticules peuvent diffuser dans le matériau d’emballage. Il y a des paramètres qui favorisent cette diffusion : la température, le temps de contact et la concentration des nanoparticules. Une fois diffusées, certaines peuvent présenter une affinité chimique avec les éléments du produit. En particulier si ce dernier est riche en graisse. Parmi les nanoparticules de ces nouveaux emballages, certaines sont en effet des molécules hydrophobes. Elles n’ont pas d’affinités avec l’eau et préfèrent ainsi l’huile…

Elles migrent donc spontanément vers le corps gras des plats cuisinés.

Il reste encore à évaluer la mobilité de chaque nanoparticule et à en tirer des conséquences sur chaque catégorie d’emballage. Un travail de longue haleine qui a débuté avec la constitution de Serenade, en 2012. Cet acronyme anglais signifie Safer Ecodesign Research and Education applied to NAnomaterial DEvelopment, soit Recherche et formation appliquées à la conception plus sécurisée des nanomaté­riaux. Pas moins de treize groupes de recherche interdisci­plinaire composés de physiciens, chimistes, biologistes et toxicologues travaillant dans des laboratoires européens. Le défi est immense : évaluer toute la chaîne d’utilisation des nanomatériaux depuis la production jusqu’à la fin de vie, au recyclage et traitement des effluents qui les recueillent. Un travail de fourmi qui court sur huit ans et nécessite des équipements de très haute technologie, car il s’agit de mesurer les quantités de nanoparticules présentes dans des produits, ce qui est un défi pour l’analyse.

La barrière des quatre nanomètres

Les premières mesures sur les nanos effectuées par Serenade ont créé la surprise. Pour commencer, mieux vaut être lilliputien parmi les minus pour migrer. Ainsi toutes les nanoparticules dont la taille dépasse 4 nm n’y parviennent pas ! Ou alors très difficilement : il faut que le temps de contact dure… 450 ans pour quitter l’embal­lage et parvenir au sein du produit. Ce sera le cas d’une molécule sur un million ! Un résultat plutôt rassurant, car celles qui ont une taille inférieure à 4 nm ne sont vraiment pas nombreuses !

Seulement il y a un autre phénomène qui pourrait changer leur sort : l’emballage peut être lui-même malmené, tiraillé, tordu, déchiré… et cette sollicitation mécanique le fragilise et favorise la migration des plus grosses que 4 nm. De la même manière, quelques autres pistes doivent être examinées. Par exemple, la forme de la nanoparticule intervient aussi dans sa mobilité. Bien ronde, elle se déplace plus facilement.

1 Xuefei L., et al., 2013. Nanotoxicity: A growing need for study in the endocrine
system. Small.

Source : La Nanorévolution de Azar Khalatbari, avec Jacques Jupille, paru aux éditions Quæ

nanorévolution

Une réflexion au sujet de « Les nanoparticules dans les emballages alimentaires : une bonne idée ? »

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *