Les villes, de futures réserves pour les insectes ?

Le besoin de nature de nos contemporains ne cesse d’augmenter avec la densité du tissu urbain. Cette nouvelle aspiration se traduit par une évolution très nette des pratiques d’entretien des espaces publics.

Les parcs et jardins publics ne sont plus entretenus uniquement selon des critères esthétiques mais aussi écologiques. La gestion différenciée laisse une place à la flore et à la faune sauvages. Dans le nouveau concept de « ville durable » qui ne cesse de progresser, la préservation, voire la favorisation de la biodiversité, tient une place essentielle. Et comme les insectes représentent environ la moitié de cette biodiversité, ils bénéficient directement de ces nouvelles conceptions.

Le succès d’opérations de sciences participatives comme le suivi des papillons dans les jardins montre que les insectes, du moins certains d’entre eux, recueillent la sympathie du public. La vogue actuelle des hôtels à insectes ne pourrait pas s’expliquer autrement. Les efforts pédagogiques auprès des enfants et du grand public pour faire découvrir le monde des petites bêtes et contrecarrer la répulsion souvent transmise des parents aux enfants comptent aussi dans ces évolutions.

L’hôtel à abeilles de l’ONF, installé devant les locaux de l’Office pour les insectes et leur environnement, à Guyancourt (banlieue parisienne).  © Vincent Albouy

L’avenir serait-il à l’enseignement de l’entomologie dans les cours de formation des architectes-paysagistes urbains ? En comprenant le fonctionnement écologique des espaces verts inclus dans le tissu urbain, qu’il s’agisse de parcs et jardins publics ou de délaissés comme les bords de route, ils pourront ainsi favoriser le maintien ou l’augmentation de la biodiversité en intégrant ces éléments dans leur planification.

Mais cette vision, qu’en tant qu’entomologiste je ne peux qu’appeler de mes vœux, est probablement trop optimiste. Un hiatus, pour ne pas dire un fossé, se dessine entre une nature qui apparaît aux yeux des citadins d’autant plus idyllique qu’elle est lointaine, et la réalité de la perception par une majorité d’entre eux de ces bestioles grouillantes qui représentent une moitié de cette nature. Ou pour dire les choses autrement, la peur, la répulsion vis-à-vis des insectes et leurs inconvénients pourraient malheureusement être plus forts que l’intérêt qu’ils peuvent susciter et les services qu’ils peuvent rendre.

LE SAVIEZ-VOUS ?

Un hôtel à insectes est une structure qui rassemble divers nichoirs et abris à insectes, placée dans un jardin public ou privé. Toutes les tailles existent, depuis une simple caisse sur pied munie d’un toit abritant quelques nichoirs jusqu’au modèle imposant conçu et commercialisé par l’Office national des forêts (ONF) à destination des collectivités.

C’est autant une œuvre d’art qu’un objet utilitaire, et certains jardiniers rivalisent de créativité dans ce domaine. Les seuls nichoirs à être vraiment efficaces sont les bottes de tiges creuses (notamment de bambou) et les blocs de bois percé car ils répondent à une vraie crise du logement chez les abeilles et les guêpes solitaires. Ils sont très vite occupés, à condition que les trous varient entre 2 et 10 mm de diamètre et qu’ils soient fermés à une extrémité.

Les autres structures comme les abris à perce-oreilles, à coccinelles, à chrysopes, à papillons, les nichoirs à bourdons dont les plans circulent sur Internet, sont très rarement occupées par les espèces auxquelles on les destine. Elles trouvent souvent ailleurs des endroits plus confortables pour se loger. Ce qui ne veut pas dire que ces structures soient inutiles : elles abritent bien d’autres locataires, comme des mouches, des punaises, des araignées, des cloportes, etc.

 

Visuel haut de page : © Vincent Albouy

Source : Des insectes en ville de Vincent Albouy, paru aux éditions Quæ

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