Photo BANQUISE : En hiver, une banquise côtière très étendue relie les îles de l’archipel François-Joseph, à l’exception de quelques polynies récurrentes qui apparaissent régulièrement au même endroit.

La banquise : de la glace partout ?

La banquise qui recouvre les océans polaires est parfois percée de vastes zones totalement libres de glace, même au plus fort de l’hiver.

Baptisées « polynies », du russe « polynya » qui signifie « clairière », elles ont des origines et une durée de vie variées. Lorsqu’elles sont dues à la divergence des plaques de glace, elles ne sont que temporaires et se referment rapidement. Dans d’autres cas, elles persistent tout l’hiver lorsque certaines conditions locales contrarient l’apparition ou le maintien en place de la glace nouvellement formée.

Les vents violents sont des acteurs majeurs, notamment près des côtes où ils prennent de la vitesse en descendant des reliefs, repoussant au large les plaques de glace au fur et à mesure de leur apparition : ce sont les polynies dites de « chaleur latente ». Plus rarement, des courants réchauffent les eaux de surface ou participent à leur brassage, empêchant la formation de banquise : ce sont les polynies dites de « chaleur sensible ». Bien souvent, la présence de brouillard dû à l’évaporation de l’eau trahit leur présence.

Entre 1974 et 1976, une gigantesque polynie de ce type fit son apparition en plein cœur de la mer de Weddell (Antarctique), couvrant une surface de 250 000 km2. Elle est réapparue en 2017. Vents violents et courants océaniques se conjuguent parfois, contribuant au maintien de ces pièces d’eau libres de glace très prisées des oiseaux et des mammifères marins en hiver.

Photo BANQUISE : Lumière crépusculaire en mer de Weddell (Antarctique). Tel un lac de lave solidifiée flottant sur un magma liquide, la banquise se disloque, se fissure et se fragmente, laissant l’océan s’infiltrer dans les moindres ouvertures.

Lumière crépusculaire en mer de Weddell (Antarctique). Tel un lac de lave solidifiée flottant sur un magma liquide, la banquise se disloque, se fissure et se fragmente, laissant l’océan s’infiltrer dans les moindres ouvertures. © Fabrice Genevois

Leur intérêt est décuplé lorsqu’il s’agit de « polynies récurrentes », c’est-à-dire qui apparaissent invariablement au même endroit, d’une année à l’autre. Si certaines ont la taille d’un terrain de football, d’autres s’étalent sur plusieurs milliers de kilomètres carrés et sont facilement repérables grâce à l’imagerie satellite.

Dans l’Arctique, la grande polynie située au nord de la baie de Baffin, entre le Groenland et l’île Ellesmere, dispose d’une taille comparable à celle de la Suisse. Bien connue des baleiniers du XIXe siècle qui l’appelaient « la grande eau du Nord », elle permettait aux embarcations de pénétrer loin vers le nord, vers de fructueux terrains de chasse.

Les 37 grandes polynies récurrentes répertoriées en Antarctique sont principalement situées près de la côte et sont dues aux vents violents qui descendent de la calotte glaciaire continentale. Ce sont de véritables « fabriques » de banquise, dans la mesure où la glace est évacuée au fur et à mesure de sa formation. La glace expulsant une grande partie du sel lors de sa formation, l’eau dense des polynies migre en profondeur et intègre le grand système de circulation océanique à l’échelle planétaire.

 

Visuel haut de page : En hiver, une banquise côtière très étendue relie les îles de l’archipel François-Joseph, à l’exception de quelques polynies récurrentes qui apparaissent régulièrement au même endroit. © Colin Souness

Source : Banquise de Fabrice Genevois et Alain Bidart, paru aux éditions Quæ

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